Business : Ça roule pour les moto-taxis
14 avr 2008
Apparues en région parisienne il y a quelques années, les sociétés de moto-taxis commencent à se développer en province. Mais attention, pour réussir sur ce business encore jeune, quelques règles de « bonne conduite » s’imposent.
Face à l’engorgement de la circulation dans les grandes villes, l’activité de moto-taxis connaît depuis quelques années un réel essor. A Paris et en région parisienne, une petite dizaine de sociétés se sont lancés sur ce marché. En province, le développement est plus timide mais la plupart des grandes agglomérations possèdent désormais leur société de moto-taxis (Nice, Marseille, Lyon, Grenoble, Bordeaux, Montpellier...).
Une clientèle de cadres
La cible de cette nouvelle génération de taxis à deux roues ? Les hommes d’affaires et les cadres pressés amenés à se déplacer fréquemment pour leur travail. « Nous vendons de la ponctualité » explique Cyril Masson, créateur de City-Bird, une des premières entreprises à s’être lancée sur le créneau en 2003. « A cette époque, j’étais directeur commercial dans une grand entreprise et je rattais régulièrement les avions que j’avais à prendre. J’ai rapidement compris qu’un service de taxis à deux roues simplifierait la vie de nombreux cadres » poursuit le jeune entrepreneur qui confie ne rien avoir inventé. « En Afrique et en Amérique du Sud, les taxis à deux roues existent depuis longtemps. A Rio de Janeiro, ils sont plus de 350 ».
Pas de législation en vigeur
En France, l’apparition des motos taxis a été retardée par l’absence de réglementation. C’est un métier nouveau, sans cadre réglementaire ni loi pour l’encadrer. Des projets sont actuellement à l’étude pour clarifier l’activité et éviter que n’importe qui se lance sur le marché. « Il ne suffit pas d’avoir une moto et d’attendre les clients à la sortie de l’aéroport. La réalité est bien plus complexe et la sécurité des clients est une des priorités de notre métier » poursuit Cyril Masson qui est passé d’un chiffre d’affaires de 15 000 euros la première année à plus de un million d’euros en 2007. Les taxis ne voient pas d’un très bon œil l’essor de ces concurrents à deux roues. La fédération des taxis rappelle d’ailleurs que l’appellation taxi est réservée aux véhicules automobiles.
Investissement de départ
Un minimum de 60 000 euros est nécessaire pour lancer l’activité : cela comprend l’achat des motos (scooter de préférence car plus rapides en ville), des accessoires (casque, vêtements de pluie, gants... fournis au client), d’un logiciel de réservation/planning, voire d’un site internet. « Nous nous sommes lancés avec 100 000 euros et avons commencé avec trois maxi-scooters » raconte Jean-Christophe Cepero, co-fondateur d’Easy-Moov, une entreprise implantée dans le Var depuis janvier 2008 et qui propose du transport de personnes sur Nice, Cannes, Saint-Tropez et Monaco.
Au départ, le créateur peut lui-même jouer les chauffeurs mais si l’activité décolle, il lui faudra recruter des chauffeurs. De préférence chevronnés (anciens motards de la gendarmerie par exemple) pour éviter les accidents et rassurer les assurances ! Les charges d’exploitation sont également très nombreuses : salaires et charges des chauffeurs, entretien des véhicules, essence, assurances... « Nous payons 3 000 euros par an pour assurer chacun de nos véhicules. C’est un poste de dépenses très élevé mais indispensable car nous sommes sur une activité à risques » poursuit Jean-Christophe Cepero. En l’absence de réglementation, les compagnies d’assurances se montrent en effet très frileuses et réclament des engagements sur le profil des chauffeurs : souvent dix ans d’expérience dont les cinq dernières sans sinistre.
Originalité du concept
Tous les acteurs du marché fonctionnent sur le même modèle: le client fait une réservation (par téléphone ou sur internet, au moins une heure avant sa prise en charge), une moto vient le chercher, tout l’équipement lui est proposé et il est acheminé jusqu’à se destination finale. Le plus souvent, il s’agit d’un aéroport ou d’une gare. La clientèle, professionnelle dans 80 % des cas, paie un tarif forfaitaire applicable quelque soit l’état du trafic.
Il est néanmoins possible de se démarquer. City-Bird propose depuis mars 2008 un service VIP, sorte de "business class" du moto-taxi. « Nous transportons les clients sur des grosses cylindrées, des Goldwin. Le confort est optimal, nous fournissons un casque avec une connexion pour les téléphones portables. Ce service est facturé 15 euros supplémentaires par rapport à une moto classique » déclare Cyril Masson. Certaines sociétés comme Yellow Scoot facturent à la minute : 1 euro la minute avec une prise en charge de 5 euros. D’autres comme All by Bike permettent d’emporter quelques bagages grâce à une remorque attachée à la moto. De nombreux prestataires véhiculent également les hommes d’affaires pendant une journée, à l’occasion d’un déplacement en région. « Nous les accueillons à leur arrivée à l’aéroport et les accompagnons toute la journée. Cela leur permet d’enchaîner trois ou quatre rendez-vous et d’optimiser leur déplacement « explique Jean Christophe Cepero.
Tarification
Les tarifs des moto-taxis sont plus chers qu’un taxi classique. En région parisienne, les prix sont plutôt homogènes (25 à 40 euros pour un trajet intra-muros et entre 60 et 90 euros pour un Paris centre/aéroport Charles de Gaulle). En province, la concurrence étant moins importante, les tarifs sont très variables d’une société à l’autre et d’une ville à l’autre. A Montpellier par exemple, Elite Moto facture 30 euros une coure intra muros et 110 euros une trajet jusqu’à l’aéroport de Nîmes. A Nantes, Atoutscoot propose un tarif de 20 euros pour les trajets en centre-ville et 30 euros pour aller à l’aéroport.
Il est courant de majorer ces tarifs en fonction des horaires : + 15 à 20 % aux heures de pointe (entre 8/9 heures et 19h/20 h le soir), le week-end et les jours fériés.
Il est également possible de proposer des abonnements aux entreprises, souvent des gros clients pour les sociétés de moto-taxis. « Nous avons conclu 145 contrats avec des entreprises » précise Cyril Masson. Dans ce cas, il faut prévoir un abonnement sous forme de compte prépayé, débité à chaque course, avec des réductions allant de - 15 à - 30 %. Les entreprises apprécient ce type de contrat car cela leur offre une gestion plus souple, avec une facture unique et plus simple car l’utilisateur n’a pas à payer à la fin du trajet ».
Faire connaître le service
C’est la principale difficulté sur un marché naissant. « Il faut faire connaître le service avant de faire connaître sa marque. Les réticences sont encore nombreuses. Tout le monde se dit prêt à monter sur une moto pour gagner du temps mais notre étude de marché a montré que sur 1 000 personnes, seules 4 le font vraiment. L’acquisition des clients est lente » relativise Xavier Fonte, fondateur de la société Skoot en 2006. La solution : le bouche à oreille et le matraquage publicitaire, sur internet ou dans la rue via de simple flyers.
Source: Par Valérie Froger - LEntreprise.com